Mythe ou réalité ? L’histoire de Gonneville et d’Essomericq a fait polémique.
En Normandie, d’abord.
Jacques Lévêque de Pontarhouart a longtemps crié au complot. D’après lui, le texte de Gonneville serait un fake du chanoine de Lisieux qui aurait tout inventé pour récupérer des missions dans les Terres Australes où serait allé Gonneville. Des historiens très sérieux ont contre-argumenté, comme le Professeur Jean-Pierre Chaline ou le Professeur Michel Mollat du Jourdain. Mais le ver était dans le fruit.
A vrai dire, cette controverse n’est pas ma préoccupation principale. D’une part, je suis par nature plus tentée de croire les spécialistes que les amateurs.
D’autre part, quand on me demande ici si l’histoire est vraie, je réponds qu’elle m’a été transmise, qu’elle m’a transportée, et même jusqu’au Brésil, et qu’en cela c’est une vraie histoire !
J’en suis encore plus convaincue, suite à ma rencontre avec Adriano, le chef spirituel des Indiens de Morro Alto. Il m’a parlé aussi de cette histoire, et je sens qu’elle est encore vivante pour lui et pour sa communauté. Il insiste beaucoup sur l’importance de cette communauté, la force du du groupe, du partage de connaissances entre les membres.
Pour Adriano, lorsque Gonneville a enlevé le jeune Iça-Mirim des siens, et n’a pas tenu sa promesse de le ramener au bout de vingt lunes, cela a été le commencement de la séparation de son peuple. On peut dire en effet que la période a marqué le début de sacrés ennuis pour les peuples Indiens.
Pour lui, la connaissance a provoqué la division, mais la sagesse permet la connexion. Espérons que nous saurons être plus sages que nos ancêtres.
Bref, pour moi, pas vraiment de controverse.
Pour ceux que cela intéresse, néanmoins, je vous conseille la lecture de ces deux articles de la Professeure Leyla Perrone-Moisès :
- http://www.editions-villegagnons.com/GONNEVILLE.pdf
- http://ceredi.labos.univ-rouen.fr/public/?le-voyage-de-gonneville-un-defi-a.html
Je serais bien sûre très intéressée que des historiens produisent de nouveaux documents apportant des preuves définitives.
Au Brésil également, bien sûr, on s’interroge.
Est-ce vrai que Gonneville est venu ici ? Ne serait-ce pas une construction destinée à se faire de la publicité ? S’il est venu, était-ce bien ici, d’ailleurs ?
Et la question qui est revenu plusieurs fois lors de mon séjour à São Francisco, que j’appelle la sous-polémique : Gonneville est venu dans l’Ile de São Francisco, certes, mais par quel côté de l’Ile est-il arrivé ?
En gros, il y a deux côtés possibles pour rentrer dans la baie de Babitonga, le Nord, plus près de la commune actuelle de Sao Francisco do Sul, et le Sud, du côté des communes de Barra do Sul et Araquari.
Revenons au texte de Gonneville qui évoque la découverte. La scène se passe à un moment où l’équipage est complètement perdu et assoiffé, suite à trois semaines de vent contraire, à la mort du pilote du navire, et à « de rudes tourmentes ».
« Disent que la tourmente fut suivie d’aucuns calmes, si qu’avançaient-ils peu. Mais Dieu les réconforta ; car ils commencèrent à voir plusieurs oiseaux venant et retournant du côté du sud, ce qui leur fit penser que de là ils n’étaient éloignés de terre : pour quoi, jaçoit qu’aller là fut tourner le dos à l’Inde orientale, nécessité ci fit tourner les voiles ; et le cinq janvier découvrirent une grande terre, qu’ils ne purent aborder que l’assoirant du lendemain, obstant un vent de terre contraire ; et ancrèrent à bon fond.
Et dès ledit jour aucuns de l’équipage furent en terre reconnaître; et dès le matin suivant fut envoyée la barge ranger la côte pour trouver port, et revint l’après-midi; et conduisit la navire dans une rivière qu’elle avait trouvée, qui est quasiment comme celle de l’Orne. »
L’Orne …
Dans la sous-polémique on cherche à définir quelle est l’entrée de la baie qui ressemble le plus à l’Orne. De jour, de nuit, sur terre, par mer, j’ai pu voir par moi-même la différence entre les deux paysages (merci pour les promenades !).
Très beaux tous les deux.
Mais zut, je suis déjà allée à Ouistreham il y a longtemps, mais je n’avais guère porté attention à la forme de la rivière.
Regardons les photos satellites. Merci Google.



Au Nord, c’est un peu trop large, mais la forme, sur les photos, ne me semble pas très éloignée. Au Sud, c’est plus proche de la largeur de l’Orne, mais moins dans la même forme.
Dans tous les cas, les paysages ont changé en 5 siècles ; les canaux, ponts, constructions, routes … ont modifié les écosystèmes, la sédimentologie fluviale, et le cour des rivières, et là non plus, je ne suis pas spécialiste.
Au final, je n’en sais rien. Et peu me chaut.
Mais pourquoi l’Orne ?
Ne serait-ce par la rivière la plus proche de Honfleur, que Gonneville connaissait bien ? Lequel signifierait sa joie de retrouver la terre ? Une rivière assez tranquille, dans un paysage verdoyant, avec des plages de sable blanc dans l’estuaire, des jolis forêts et des petites collines autour ?
Une sorte de métaphorne.

J’avais trouvé sur Internet les 2 articles que tu cites, ils sont très intéressants et bien argumentés. Belle aventure et blog que l’on suit avec beaucoup de plaisir. Bonne suite
La discussion sur le point d’entrée continuera… peut être avec d’autres informations à Honfleur peuvent aider a mieux comprendre. On y ira!
Mais plus fort et sincère que tout… c’était les paroles d’Adriano… on y sent très profond.
Comme tu l’écris si bien, “l’histoire est vraie”, ton histoire d’aujourd’hui.
On attend le 2e chapitre en Normandie… avec impatience !
Des bises