Gonneville, modèle d’entrepreneur

Le capitaine Binot Paulmier de Gonneville est encore méconnu.  

Et pourtant, il devrait être cité en exemple dans les cours d’entrepreneuriat et de gestion des talents des meilleures écoles de management et des universités d’entreprise.


Préambule :

Dans la suite de l’article, quelques #hashtag servent à guider le lecteur pressé (issu de LinkedIn) vers les mots clés essentiels.

Toutes les citations sont extraites de La Relation Authentique, Déclaration du voyage du Capitaine Gonneville et ses compagnons ès Indes. (Le Voyage de Gonneville 1503-1505 et la découverte de la Normandie par les Indiens du Brésil, Editions Chandeigne.)


Gonneville
GONNEVILLE (Honfleur, Jardin des personnalités. Statue de C. Champagne – 2003)

 

Binot Paulmier de Gonneville, donc, ce commerçant de Honfleur, qui est arrivé dans le Sud du Brésil en 1504, et en a ramené le jeune Indien Essomericq coche toutes les cases des #soft skills du #leader talentueux d’aujourd’hui.

Pour lire le #pitch de son projet, c’est ici.

L’environnement 

Le monde dans lequel Gonneville évolue est complètement #VUCA  (Volatile, Uncertain, Complexe, Ambigu).
Lorsqu’il part de Honfleur en 1503, que de #changements en perspective ! C’est le début de la découverte de l’Amérique, la concurrence est rude entre les pays européens, les Portugais ont ouvert le nouveau marché « des Indes Orientales », et des #challenges imprévisibles vont inévitablement se présenter (météo, pirates, maladie …).

Leader innovant, pionnier inspirant

Dans ce contexte, Gonneville a une #vision, des #objectifs commerciaux définis, et il donne le cap vers les nouveaux #horizons.

C’est un #décideur, prêt à prendre des #risques en se rendant « hors Chrétienneté ». Même lorsque les conséquences de court terme de ses décisions sont douloureuses. Quand il faut saborder le bateau pour sauver ce qu’il reste de l’équipage, il le fait.  Mais c’est aussi un #makerqui #contribue activement aux activités de l’équipe.

Il se montre particulièrement #agile et on le voit s’#adapter à de nombreuses situations nouvelles, en innovant sans cesse, et en #sortant de sa zone de confort. Il sait adapter l’itinéraire, gagner la #confiance des Indiens…
Il n’hésite pas à se lancer carrément dans la #disruption, en baptisant Indien, que d’aucuns considèrent comme un sauvage, et #casse les codes en désignant deux parrains, faut de marraine disponible. (Résultat, le jeune homme qui était gravement malade « fut mieux, se guérit »).

On peut donc affirmer que dans la période de #transformation radicale de ce début du XVIème siècle, Gonneville est un #pionnier, qui défriche des #nouveaux territoires.
Un pionnier #inspirant, de nombreux navigateurs étant partis à la recherche des Terres Autrales à sa suite. J’ai moi-même traversé l’océan 5 siècles plus tard dans son sillage (mais en avion).

En #innovateur #disruptif avisé, il sait faire jouer la #sérendipité : en cherchant la voie des Indes Orientales, il a découvert autre chose.

Le manager recruteur

Un bon capitaine, aussi #talentueux soit-il, ne réussit pas sans son #équipage.

Et c’est peut-être dans la partie #attraction des talents que Gonneville a su le plus se démarquer.

Il raisonne #global, il raisonne #Monde. #Veille concurrentielle et #benchmark l’ont conduit à aller recruter à Lisbonne deux portugais qui avaient déjà expérimenté les Indes Orientales.

Insistons sur cette compétence très importante, et pourtant souvent négligée : la capacité à bien #recruter.
Gonneville n’a pas peur d’#investir dans les meilleurs #talents, même s’ils sont particulièrement #atypiques sur un bateau Normand. Il connait le #marché, il #prend des références, il va chercher les #candidats rares à la #source, et sait que pour #finaliser l’embauche des meilleurs talents, il doit les payer « à gros gage ».

Le manager recruteur #performant évite le #clonage. La #diversité des profils recrutés en terme d’#origine sociale ou d’#âge (du jeune page au vieux loup de mer) montre un vrai recrutement sur les #compétences. Il y a même des profils originaux sur le bateau, comme Nicolas Le Febvre,  « curieux et personnage de savoir », probablement peu utile dans la navigation, mais qui observe toutes les nouveautés, dessine fort bien (la #facilitation graphique existait déjà !), et enrichit l’équipage de son regard différent. Il apporte sans doutes aussi un peu de détente grâce à ses diversions. Ne serait-il pas l’ancêtre du #CHO (Chief Happiness Officer) des entreprises d’aujourd’hui ?

Le #bien-être au travail des âmes des marins est en tous cas bien considéré dès le départ du navire : tous « reçurent avant partir leurs sacrements ».

Seul petit bémol peut-être au recrutement de Gonneville : bien qu’il soit très #inclusif, il ne respecte pas le cahier des charges du #label égalité professionnelle entre les hommes et les femmes (#AFNOR). On remarque en effet qu’il n’y a pas de #femme au Codir, ni dans l’encadrement, ni même parmi les collaborateurs. C’est sans doutes là son #axe d’amélioration principal.

Le co-

L’importance du groupe, de l’équipe, osons le dire, de la #co-construction, voire même du #co-building est valorisée dès le début de la Relation : « Gonneville et honorables hommes Jean l’Anglais et Pierre le Carpentier, […] firent complot ensemble d’y envoyer une navire ». «  Et parce que ces trois devant-dits n’avaient basantes facultés pour seuls mener à chef si haute entreprise, s’adjoignirent avec honorables hommes …. »

Dans le texte, les #experts clés sont consultés, et les réussites sont bien #collaboratives et non pas attribuées au seul chef, comme cela pourrait arriver parfois avec les managers incompétents. Les défunts, aussi, sont respectés, en étant nommés un à un, au fur et à mesure de l’aventure.

Grande #ouverture d’esprit et #curiosité, #empathie #bienveillante sont bien évidemment des #soft skills que Gonneville #incarne en se liant d’amitié avec Arosca, le cacique Indien. On voit encore une fois que la confiance accordée dans la #transparence ne génère que du #gagnant-gagnant, à tel point que l’Indien confie Essomericq, son plus jeune fils, à Gonneville, lui faisant promettre de la ramener au bout de vingt lunes.

Le gestionnaire pragmatique

En bon #gestionnaire, Gonneville a établi avant de partir un #inventaire chiffré précis des équipements et marchandises de l’expédition. Il a tout prévu, armement, vivres pour deux ans, marchandises variées à échanger dans les nouveaux pays rencontrés… Le #business-plan est prêt !

Il met en oeuvre sa capacité à faire du #reporting, avec cette Relation déposée à l’Amirauté de France à Rouen. On note alors la qualité de sa #communication écrite.

Résilience

Vous êtes convaincus du #talent exceptionnel et du #leadership de cet homme ?

Reste à préciser néanmoins que l’expédition de Gonneville a été un fiasco. Les deux-tiers des marins embarqués ont péri, le bateau a coulé, les corsaires ont pillé toutes les marchandises rapportés, et les dessins et journaux témoignant du voyage ont été perdus dans la bataille…  Echec !

Mais l’entreprise moderne d’aujourd’hui, justement, valorise l’#échec encore plus peut-être même que le succès facile, à en croire les nombreux articles sur le sujet.

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De cette catastrophe est née finalement une extraordinaire aventure humaine. Gonneville, de fait, n’a pas pu tenir sa promesse de ramener Essomericq au Brésil. Alors, de parrain il est devenu #mentor, mieux, père adoptif. Il a fait du jeune homme plein de #potentiel son héritier, il #développe ses talents, et lui a fait épouser sa nièce. Le couple a eu de nombreux enfants. Essomericq a vécu jusqu’à 95 ans en Normandie.

#fin

Pour en savoir plus sur mon voyage sur les traces d’Essomericq, lisez les autres articles de ce blog !